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L’HOMME DANS LE MYSTERE DU CHRIST

L’une des interrogations majeures que la personne humaine se pose lorsqu’elle atteint l’âge de la raison, est celle de savoir : qui suis-je ? En effet la question de son identité lui pose problème, car elle ne se comprend pas. Elle est constituée d’une énigme, en terme chrétien, d’un mystère[1]. Elle fait l’expérience du paradoxe, car d’une part, elle fait l’expérience de sa finitude, d’autre part, elle fait son dépassement, ouverte à l’infini, à la transcendance. Notons de prime abord, qu’il est évident de remarquer un bon nombre incalculables d’études menées sur l’anthropologie durant plusieurs siècles, le sujet demeure permanemment actuel, problématique et suscite de l’intérêt au sein de maintes disciplines en l’occurrence, la philosophie, la, sociologie, les religions et autres. Ce qui sous-entend que la plupart de ces anthropologies variées, se disputent le droit de définir son identité. Par ailleurs, constatons de nos jours, avec l’essor de l’idéologie du transhumanisme[2] ou des théories du genre, des progrès scientifiques, son être apparait menacé.  Cependant l’on se pose la question, qui est l’homme dans son origine et dans sa fin ? Qui est l’homme en son sens dernier ? Que signifie Jésus-Christ, par le fait qu’il soit homme pour nous les hommes ? Notre réflexion s’inscrit dans le cadre de l’anthropologie théologique, celle qui fait référence à la relation de Dieu avec l’homme, réfléchie à la lumière de la révélation chrétienne, afin de mieux saisir le mystère profond qui constitue l’homme.

Si l’homme en soi est un mystère pour lui-même, c’est parce qu’il est lié et enveloppé par un grand mystère qui est Dieu. C’est dans ce grand mystère qu’il a été façonné, marqué de l’empreinte de l’image et de la ressemblance divines. Ce mystère d’amour dans lequel l’homme a été créé, nous a été dévoilé de façon concrète dans Celui du Christ. En Lui tout fut créé sur la terre et dans le ciel. D’ailleurs c’est ce que Saint Paul  illustre bien dans ses écrits, sur la création de l’homme dans le Christ, en affirmant haut : « Qu’il soit béni le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus, le Christ ! Il nous  a bénis et comblés des bénédictions de l’Esprit, au ciel, dans le Christ. Il nous a choisis dans le Christ avant que le monde fut créé, pour être saints  et sans péchés devant sa face grâce à son amour. Il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus le Christ». (Eph1, 3-10). Par son incarnation, le fils de Dieu s’est en quelque sorte uni à tout homme. (GS 22)

En fait, Le but de son Incarnation, n’est pas seulement de nous justifier du péché, mais surtout de montrer à l’homme qu’il est selon le dessein de Dieu, le sens profond de son être et la sublimité de sa vocation. Par l’Incarnation, le mystère de l’homme et de Dieu se trouvent indissolublement unis. Dans son être divin et dans son être humain, il unit et réconcilie Dieu avec l’homme. Le Christ pourrait-on dire est l’ «exégèse» de l’homme, «le vrai homme et l’homme vrai»[3] qui explique l’homme. Il exprime la  parfaite humanité, selon la volonté de Dieu pour l’homme sa merveille. Ainsi, le devenir Dieu de l’homme passe par le devenir  homme  de Dieu. Autrement dit, l’ascension de l’homme vers Dieu se fonde sur la descente de Dieu vers l’homme et sur le retour subséquent du Fils vers le père. C’est dans ce contexte que, le Concile Vatican II exprime  de manière très belle cette implication mutuelle de la révélation de Dieu à l’homme en Jésus-Christ en disant que : « Dernier Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement de l’homme à lui-même et lui découvre la sublimé de sa vocation ». ( GS 22).

Par conséquent, notre humanité a besoin d’être alimentée de la relation de grâce avec Dieu. Elle doit rendre mémoire, voire actualiser la nouvelle alliance scellée par le sang du Christ. C’est de cette amitié de Dieu avec l’homme, avec chaque homme, où se trouve le lieu de notre développement véritable et de notre réalisation selon la splendeur de notre dessein. De ce fait, il serait incompréhensible de comprendre un monde sans Dieu, car comme le souligne le pape Benoit XVI : «  un humanisme sans Dieu, serait un humanisme inhumaine »[4]. Jésus Christ est le chemin de l’homme et le chemin de son histoire, parce que : «  la révélation de la plénitude divine est réalisée dans le mystère du Christ, Fils de Dieu, qui est : chemin, vérité et vie »( Cf Dominus Iesus,n°5). Dans cette suite, il importe de soutenir la position de  Luis LADARIA qui exprime que : « le chrétien est la réalisation la plus grande et la plus accomplie de l’homme, il nous révèle le sens ultime de ce que nous sommes et de ce qu’est le monde »[5].

            En sus, l’homme qui veut se comprendre : «  ne doit pas seulement se limiter pour son propre être de critère et de mesures qui seraient immédiats, partiaux, apparents et superficiels, mais doit dans ses angoisses, ses interrogations et aspirations profondes s’approcher du Christ »[6]. Par le fait, selon Jean-Yves Calvez la tâche fondamentale de l’Eglise : «  est de diriger le regard de l’homme, d’orienter la conscience et l’expérience de toute l’humanité vers le mystère du salut et d’aider les hommes à se familiariser avec la profondeur de la Rédemption qui se réalise dans le Christ »[7]. Ainsi, La pleine maturité humaine réside dans notre conformation au Christ. Croitre en Christ, c’est croitre en humanité.

Dans ce sillage le Concile Vatican II affirme que : « celui qui suit le Christ homme parfait, devient lui-même plus homme » (GS 41).

En définitif, c’est dans la lumière du Christ que doit venir la véritable  conscience de l’identité de l’homme en même temps que les dons nécessaires à l’accomplissement de sa vocation. En effet, parler de l’homme, c’est parler de Dieu ; parler de Dieu, c’est parler de l’homme, car on ne peut pas penser Dieu, si l’homme n’est pas. De même on ne peut  parler de l’homme s’il n’avait pas été créé par son Créateur. Le mystère de l’homme ne  se révèle que dans le Mystère du verbe incarné, et même malgré cette révélation, l’homme demeure un mystère.

JULES JOSEPH DIEDHIOU, OMI.


[1] SESBOUE Bernard, L’homme merveille de Dieu, Salvator, Paris, p.20

[2] Le transhumanisme : est un mouvement culturel et intellectuel prônant l’usage des sciences et techniques afin d’améliorer la condition humaine notamment l’augmentation des capacités physiques et mentale des êtres humains.

 [3] SESBOUE Bernard, L’homme.,Op.cit, p.20

[4] BENOIT XVI, Caritas in veritate,Rome,Libreria Vaticana,n°79.

[5] LADARIA Luis, Mystère de Dieu et mystère de l’homme, anthropologie théologique, vol 2, Parole et Silence, Paris, 2011, p. 70.

[6] Jean Paul II, Redemptor hominis,Rome, Libreria Vaticana, n°10.

[7] CALVEZ Jean-Yves, L’homme dans le mystère du Christ, le message de Jean Paul II, Desclée de Brouwer,Paris, 1993, p.20.